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" Fidèle à sa patrie, le scout est pour l'Europe unie et fraternelle. " - Le Mot du Padre par le Père Erwan de Kermenguy

16 juillet 2021 Le mot du Padre

J’étais, au lendemain du 14 juillet, dans un car de guides en route pour le Mont St Michel. Elles enchaînaient les chants, passant du plus spirituel aux chants à boire, des chants scouts aux chants de marins. Elles en étaient rendues à chanter « l’enfant de Strasbourg » pendant que j’essayais de méditer sur la deuxième lecture de ce dimanche. La complainte sur la perte de l’Alsace-Lorraine se superposait aux mots de St Paul : « le Christ a séparé le mur de la haine, des deux, le Juif et le païen, il a fait une seule réalité, par sa chair crucifiée, il a supprimé le mur de la haine. » Et je repensais ainsi à notre responsabilité de Guides et Scouts d’Europe, d’œuvrer pour une

« une Europe unie et fraternelle ».

Nous avons tous besoin de nous sentir membres d’un groupe. Nos uniformes rendent visible notre fraternité : il suffit de voir notre joie dans une gare ou sur une aire d’autoroute lorsque nous apercevons un uniforme scout, même de nombreuses années après avoir rangé le nôtre au placard.

Mais nous savons aussi que cette appartenance peut se muer en conflits stupides lorsque la saine émulation entre deux patrouilles ou deux groupes scouts devient jalousie et mesquinerie. Il en va de même à l’échelle des états. Comment comprendre que des nations chrétiennes aient versé tant de sang ?

Je crois que la paix ne peut naître que de la rencontre, mais que la rencontre suppose de se connaître soi-même.

Je repensais au sentiment étrange qui m’avait habité la veille en entendant les guides chanter la Marseillaise en l’honneur de notre fête nationale. Je repensais à tant de fois où elles avaient rejoué à camp les Guerres de Vendée ou la chouannerie…. Comment dépasser les conflits meurtriers et fratricide, sans perdre la mémoire ?

Le pape François, dans Fratelli Tutti, écrit ainsi :

« Il est facile aujourd’hui de céder à la tentation de tourner la page en disant que beaucoup de temps est passé et qu’il faut regarder en avant. Non, pour l’amour de Dieu ! On ne progresse jamais sans mémoire, on n’évolue pas sans une mémoire complète et lumineuse. Nous avons besoin de garder vivante la flamme de la conscience collective, témoignant aux générations successives l’horreur de ce qui est arrivé » (Fratelli Tutti n°249)

Et il poursuit :

« Je ne me réfère pas uniquement à la mémoire des horreurs, mais aussi au souvenir de ceux qui, dans un contexte malsain et corrompu, ont été capables de retrouver la dignité et, par de petits ou grands gestes, ont fait le choix de la solidarité, du pardon, de la fraternité. Il est très sain de faire mémoire du bien. » (Fratelli Tutti n°249)

Je crois que c’est justement l’enjeu lorsque nous parcourons la France et l’Europe, au fil des camps. C’est l’enjeu des explos, c’est aussi l’enjeu des thèmes retenus pour nos camps d’été : approfondir la mémoire, non pour être figés dans le passé ou pour refaire les guerres d’autrefois, mais pour progresser dans une mémoire lumineuse, faisant mémoire des horreurs du passé et de l’héroïsme des humbles.

J’en étais rendu là dans mes réflexions, quand les guides hurlèrent la fin du chant (jusque-là, la complainte de l’enfant de Strasbourg était une douce mélodie qui accompagnait bien ma méditation) : « mais mon petit cœur, il restera français ! » Il y eu un bref silence dans le car et aussitôt un cri : « oh cheftaine, un Mc Do ! on y va ? »

La fraternité universelle à laquelle le scoutisme nous invite (et au-delà du scoutisme, notre foi !) n’est pas l’uniformité d’un commerce standardisé. Comme l’écrit encore le Pape François :

« Il existe un modèle de globalisation qui soigneusement vise une uniformité unidimensionnelle et tente d’éliminer toutes les différences et toutes les traditions dans une recherche superficielle d’unité. Cette globalisation détruit la richesse ainsi que la particularité de chaque personne et de chaque peuple. Ce faux rêve universaliste finit par priver le monde de sa variété colorée, de sa beauté et en définitive de son humanité ». (Fratelli Tutti n°100)

Heureusement, le cri de joie des guides devant le Mc Do (où nous ne nous sommes pas arrêtés, je vous rassure) n’était rien en comparaison de leur enthousiasme lorsqu’elles découvrir notre but véritable : le Mont St Michel. L’appel du hamburger fut moins fort que la beauté des pierres médiévales.

Permettez-moi de terminer par une dernière remarque. Guides et scouts d’Europe, n’oublions pas de chanter le chant de la promesse en entier… et de le vivre.

Par-dessus les frontières, tendons la main.

 

CR Equipe Nationale Louvetisme




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