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[QUESTION ÉDUCATION] La finalité de l'éducation intégrale - François-Xavier Clément
La finalité ultime de toute éducation catholique est le salut de la personne, sa vie éternelle. Ce but engage la foi et nécessite d’éveiller très tôt chez l’enfant un regard qui passe au-delà des limites apparentes de la vie terrestre. Un enfant est confronté très tôt à la question du deuil par le décès de ses grands-parents ou par d’autres disparitions. Ces évènements sont des occasions privilégiées pour aborder avec eux l’entrée dans la vie éternelle et le caractère familier de ce que l’Église appelle la « communion des Saints ». Certaines familles évitent le sujet de la mort avec les enfants considérant que leur chagrin peut les déstabiliser. Il me semble à l’inverse que l’absence de parole sur la vie éternelle laisse la place à l’imagination des enfants et à toutes les autres réponses que le monde et les médias pourraient leur apporter.
Il faut donc nourrir leur vie intérieure d’une grande aspiration à vivre avec le Christ.
A chaque âge convient des paroles différentes, mais il n’y a pas d’âge où l’on ait à se taire sur un sujet aussi essentiel. « Je crois à la Résurrection de la chair, à la vie éternelle » voilà une parole du Credo qui mériterait davantage de catéchèse et de pédagogie pour que la foi de nos enfants soit forte à ce sujet et que grandisse peu à peu dans leur cœur le désir de la Sainteté et du Ciel.
Ce désir du Ciel dont parle si bien Anne de Guigné dans un dialogue avec sa maman :
– « Et de quoi parles-tu au Petit Jésus ?
– Je lui dis que je L’aime, puis je Lui parle de vous, des autres (ses frère et sœurs) pour que Jésus les rende très bons, puis je Lui parle surtout beaucoup des pécheurs. Puis, rougissant un peu, elle ajouta : et puis je Lui dis que je voudrais Le voir.
– Alors, le cœur étreint par l’angoisse, j’ajoutais : tu ne penses donc pas à mon chagrin si tu allais voir le Petit Jésus, ma chérie ?
– Oh ! si, Maman, j’y pense et je voudrais bien ne pas vous faire de peine, mais Papa est au déjà au Ciel, vous irez, les autres aussi, puisque c’est notre but ! »
Exemple d’une belle âme entièrement tournée vers le Bon Dieu qui peut facilement suppléer la difficulté d’un éducateur à aborder cette délicate question du trépas et de la vie éternelle.
La terrible phrase de Dostoïevski dans « Les Frères Karamazov », « Si Dieu n’existe pas alors tout est possible »[1], résonne alors comme un avertissement sur l’absence de limite et l’absence de sens à la vie humaine. Car si Dieu n’existe pas alors pourquoi faudrait-il préféré le beau, le bien, le Vrai à toutes les erreurs, aux errements des égoïsmes humains ? Si Dieu n’existe, et qu’Il n’est pas mort et ressuscité pour nous ouvrir le chemin de la Vie éternelle, alors toutes les petites et les grandes souffrances sont de terribles absurdités. Dans ce cas il vaut mieux jouir de l’instant présent sans réserve.
« Tout enfant, disait le Père Lacordaire, est introduit dès sa naissance aux portes de l’Éternité. » Ainsi, cette fin dernière doit éclairer et diriger toutes les paroles et toutes les exigences d’un éducateur catholique. Il convient donc de privilégier tout ce qui conduit à la sainteté et éviter tout ce qui risque d’y nuire. Cette finalité est disposée comme la cime et l’Espérance qui sert de point fixe et de point de relativité absolue pour une vie tout entière. La lumière de la vie éternelle permet alors d’envisager toutes les autres exigences de la vie. Si la vie est une impasse, à quoi bon ? Cet « aquoibonisme » qui fait tant de mal dans le cœur de la jeunesse, la désespère et peut même la conduire à vouloir en finir avec cette vie. La Vie éternelle comme cime de la vie devient alors la raison d’être des petits et des grands efforts pour grandir sur le chemin de perfection dont parle Sainte Thérèse d’Avila. Il convient alors de conduire l’enfant à accepter et offrir les épreuves de la vie. Les yeux sont alors parfois « enlarmés » parce que la tristesse de la chair existe, mais le cœur peut garder l’Espérance et demeurer fort pour continuer à vivre ce « pèlerinage terrestre » comme une préparation à la vie éternelle.
Jean de Viguerie achevait sa réflexion sur l’Église et l’éducation par ces quelques lignes que je fais mienne : « Ce n’est pas un être périssable que l’Église prend en charge. C’est un être immortel. Un enfant de Dieu promis à la vie divine. Les éducateurs peuvent l’oublier, mais l’Église, Elle, ne l’oubliera jamais. »[2]
[1] Dostoïevski, in « Les Frères Karamazov » La Pléiade - page 617
[2] Jean de Viguerie, in « L’Église et l’éducation » - édition Dominique Martin Morin 2001 ; page 147
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